English followed by une version en français y una versión en español.
Austen, Emma, Lacan, marriage
The not necessarily happy end of Jane Austen’s Emma has the young heroine greatly pleased to be marrying a gracefully oppressive older gentleman named Mr. Knightley. On rereading the novel recently, I was struck, above all, that Austen had not named this character Mr. Knight. That is, a Mr. Knight would be a solid, identifiable person, but a Mr. Knightley is a facade. An adjective instead of a noun.
There is a line attributed to the French psychoanalyst Jacques Lacan: love is giving something you haven’t got to someone who does not exist. And so if the not always so gentle gentlewoman Emma marries the ostensible gentleman Mr. Knight-ish . . .
Re-reading the novel it also struck me that Austen might have known more about landing a mate in early nineteenth century England than she did about marriage. Which can be, among other things, a long haul. Recently, too, on la rue des Écoles—School Street—in Paris, a woman friend had told me that her first husband had proved to be un fantôme, a ghost. Which, with the Lacanian line in mind, led me to wonder if most spouses are, or begin as, ghosts.
And, as some marriage experts have written, the crisis comes when we begin to glimpse the real person we’re shacked up with. And they begin to glimpse us. Do more than a few marriages involve a series of maneuvers, on the part of both spouses, to maintain some distance and ignorance—me of her (or him) and her of me? And this is but the tip of the iceberg: we try yet harder to maintain some distance from and ignorance of ourselves?
Emma is often considered a sort of coming-of-age novel. Emma may seem a rough gemstone. She makes a few embarrassing gaffes. She needs polishing. And, luckily, a neighbor of hers—this Mr. Knightly—is a polished polisher.
On re-reading, I couldn’t help feeling that this could prove a problem, as the older Knightley has long been in love with Emma’s girlishness. What will he do, or feel, when she, and her mind and figure along with her, become a mother?
More generally, I have lived almost 70 years, and of course I have seen that human beings transition from childhood through adolescence to adulthood, often gaining a degree of autonomy. But I have not found adults to be exempt from the errors in judgment, the cattiness or snobbery which distinguish the young Emma. No more than Jane Austen, perhaps, have I found that wealth makes people nicer or more worthy, though of course it allows for the construction of more gleaming and elaborate facades.
As with any Austen novel, much of Emma involves young adults searching for the best possible mate. Social status and annual income count for a great deal, but a good character is given pride of place. But if human beings are, in fact, as human beings are . . . If, as Freud tried to teach us, and as the character Frank Churchill in Emma suggests, there is an ongoing civil war: between our attempts to conform to burdensome social demands and our wish to fulfill selfish desires . . .
Mixing Lacan with Wilde, I will conclude by proposing that a certain kind of fiction allows some readers to imagine that a fortunate few get away with offering what they haven’t got to people who do not exist.
Notes
The line “love is giving something you haven’t got to someone who does not exist” is from the British psychoanalyst Adam Phillips’s rendition of a line of Lacan’s. However, in the French historian and psychoanalyst Elisabeth Roudinesco’s book on Lacan the quotation is « L’amour c’est donner ce que l’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas. » Love is giving something you don’t have to someone who doesn’t want it.
- Adam Phillips, “On Love,” in On Flirtation (Harvard University Press, 1994), 39.
- Elisabeth Roudinesco. Lacan, envers et contre tout (Seuil, 2011), 99.
- Oscar Wilde, The Importance of Being Ernest: “The good ended happily, and the bad unhappily. That is what Fiction means.”
Working on this piece, I was reminded of this poem posted on Montaigbakhtinian two years ago (and also appearing in Light verse, light verse: Everything else is worse).
And as regards ghost spouses, see Nora’s speeches at the conclusion of Henrik Ibsen’s Et dukkehjem (A Doll’s House), which has been at times the world’s most performed play. Nora tells her husband she’s suddenly realized that for the eight years of their marriage she’d been living with a strange man she did not know and had had three children with him. “Oh, I can’t bear to think of it!” she says. “I could tear myself into little bits!”
Français
Austen, Emma, Lacan, le mariage
La fin pas nécessairement heureuse du roman Emma, de Jane Austen, voit la jeune héroïne très heureuse d’épouser un gentleman plus âgé, gracieusement oppressant, nommé M. Knightley. En relisant le roman récemment, j’ai été frappée, avant tout, par le fait qu’Austen n’avait pas nommé ce personnage M. Knight. En effet, un M. Knight (ou M. Chevalier) serait une personne solide, identifiable, mais un M. Knightley est une façade. Un adjectif à la place d’un nom.
Il y a une phrase attribuée à Lacan : l’amour, c’est donner quelque chose que l’on n’a pas à quelqu’un qui n’existe pas. Et donc, si la gentille Emma, pas toujours très gentille, épouse le prétendu gentleman M. Knightley…
En relisant le roman, j’ai également été frappé par le possibilité qu’Austen en savait plus sur les façons de trouver un époux dans l’Angleterre du début du XIXe siècle que sur le mariage. Qui peut être, entre autres choses, un long voyage. Récemment aussi, dans la rue des Écoles à Paris, une amie m’a raconté que son premier mari s’était avéré un fantôme. Ce qui, avec la ligne lacanienne en tête, m’amène à me demander si la plupart de nos conjoints sont, ou sont au début, des fantômes.
Et, comme l’ont écrit certains spécialistes du mariage, la crise survient lorsque nous commençons à entrevoir la véritable personne avec laquelle nous sommes en couple. Et elle commence à nous entrevoir. Plus d’un mariage implique-t-il une série de manœuvres, de la part des deux époux, pour maintenir une certaine distance et ignorance – moi d’elle (ou lui) et elle de moi ? Et ce n’est que la partie visible de l’iceberg : nous essayons encore plus de maintenir une certaine distance et une certaine ignorance de nous-mêmes ?
Emma est souvent considéré comme une sorte de roman d’apprentissage. Emma peut sembler être une pierre précieuse brute. Elle fait quelques gaffes embarrassantes. Elle a besoin d’être polie. Et, heureusement, un de ses voisins, ce M. Knightly, est un polisseur poli.
En relisant, je n’ai pas pu m’empêcher de penser que cela pourrait poser problème, car ce monsieur, plus âgé, est depuis longtemps amoureux de la jeune fille Emma. Que fera-t-il, ou ressentira-t-il, lorsqu’elle, et ses pensées et sa silhouette, deviendra une mère ?
De manière plus générale, j’ai vécu près de 70 ans, et bien évidemment j’ai constaté que les êtres humains passent de l’enfance à l’adolescence puis à l’âge adulte, gagnant souvent un degré d’autonomie. Mais je n’ai pas trouvé que les adultes étaient exempts des erreurs de jugement, de la méchanceté ou du snobisme qui caractérisent la jeune Emma. Pas plus que Jane Austen, peut-être, je n’ai trouvé que la richesse rend les gens plus gentils ou plus honnêtes, même si, bien sûr, elle permet de construire des façades plus brillantes et plus élaborées.
Comme dans tout roman d’Austen, une grande partie d’Emma met en scène de jeunes adultes à la recherche du meilleur époux possible. Le statut social et le revenu annuel comptent pour beaucoup, mais un bon caractère est mis à l’honneur. Mais si les êtres humains sont, en fait, tels qu’ils sont… Si, comme Freud a tenté de nous l’enseigner, et comme le suggère le personnage de Frank Churchill dans Emma, il existe une guerre civile en cours : entre nos tentatives de nous conformer à des exigences sociales et notre désir de satisfaire des désirs égoïstes…
Mêlant Lacan à Wilde, je conclurai en proposant qu’un certain type de fiction permet à certains lecteurs d’imaginer que quelques chanceux peuvent, en fait, s’en tirer en offrant ce qu’ils n’ont pas à des gens qui n’existent pas.
Español
Austen, Emma, Lacan, el matrimonio
El final, no necesariamente feliz, de la novela Emma, de Jane Austen, tiene a la joven heroína muy satisfecha de casarse con un caballero mayor, elegantemente opresivo, llamado Sr. Knightley. Al releer la novela recientemente, me llamó la atención que Austen no hubiera llamado a este personaje Sr. Knight. Es decir, un Sr. Knight -un verdadero caballero- sería una persona sólida e identificable, pero un Sr. Knightley es una fachada. Un adjetivo en lugar de un sustantivo.
Hay una frase atribuida al psicoanalista francés Jacques Lacan: el amor es dar algo que no se tiene a alguien que no existe. Y así, si la no siempre tan gentil dama Emma se casa con el ostensible caballero Sr. Knightley…
Releyendo la novela, también se me ocurre que Austen podría saber más sobre cómo conseguir esposo en la Inglaterra de principios del siglo XIX que sobre el matrimonio. Que puede ser, entre otras cosas, un largo camino. Hace poco, también, en una calle de escuelas -la rue des Écoles en París- una amiga me contó que su primer marido había resultado ser un fantôme, un fantasma. Lo cual, con la línea lacaniana en mente, me lleva a preguntarme si la mayoría de nuestros cónyuges son, o al principio son, fantasmas.
Y, como han escrito algunos expertos en matrimonios, la crisis llega cuando empezamos a vislumbrar a la persona real con la que nos juntamos. Y ellos empiezan a vernos a nosotros. ¿Más de un matrimonio implica una serie de maniobras por parte de ambos cónyuges para mantener cierta distancia y desconocimiento: yo de ella (o él) y ella de mí? Y esto no es más que la punta del iceberg: ¿nos esforzamos aún más por mantener cierta distancia y desconocimiento de nosotros mismos?
Emma suele considerarse una especie de novela de madurez. Emma puede parecer una piedra preciosa en bruto. Comete algunas meteduras de pata embarazosas. Necesita ser pulida. Y, por suerte, un vecino suyo, este Sr. Knightly, es un pulidor pulido.
Al releerlo, no pude evitar pensar que esto podría ser un problema, ya que este señor, de más edad, lleva mucho tiempo enamorado de la joven Emma. ¿Qué hará, o qué sentirá, cuando ella, y sus pensamientos y figura con ella, se conviertan en madre?
En términos más generales, he vivido casi 70 años y, por supuesto, he visto cómo los seres humanos pasan de la infancia a la adolescencia y a la edad adulta, adquiriendo a menudo cierto grado de autonomía. Pero no he encontrado que los adultos estén libres de los errores de juicio, la mezquindad o el esnobismo que distinguen a la joven Emma. Tal vez no más que Jane Austen, descubrí que la riqueza hace a la gente más amable o más decente, aunque por supuesto permite la construcción de fachadas más brillantes y elaboradas.
Como en todas las novelas de Austen, gran parte de Emma trata de jóvenes adultos en busca del mejor marido posible. El estatus social y los ingresos anuales cuentan mucho, pero el buen carácter ocupa un lugar privilegiado. Pero si los seres humanos son, de hecho, como los seres humanos son… Si, como trató de enseñarnos Freud, y como sugiere el personaje de Frank Churchill en Emma, existe una guerra civil en curso: entre nuestros intentos de ajustarnos a las exigencias sociales y nuestro deseo de satisfacer los deseos egoístas…
Mezclando a Lacan con Wilde, concluiré proponiendo que cierto tipo de ficción permite a algunos lectores imaginar que unos pocos afortunados pueden, de hecho, salirse con la suya ofreciendo lo que no tienen a personas que no existen.